Madagascar: castration chirurgicale


Le 23 février 2024, la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) de Madagascar a rendu une décision majeure concernant la loi n°2024-001, modifiant et complétant certaines dispositions du Code pénal malgache. Cette décision, n°07-HCC/D3, a été sollicitée par le Président de la République pour un contrôle de constitutionnalité préalable à la promulgation de la loi. Ce texte législatif introduit des mesures sévères, notamment la castration chimique et chirurgicale pour les auteurs de viols sur mineurs, et a suscité un débat intense sur son alignement avec les principes constitutionnels et les droits de l’homme. L’analyse de cette décision met en lumière les enjeux complexes de la réforme pénale à Madagascar

Analyse de la Constitutionnalité de la Loi n°2024-001

Articles Jugés Non Conformes

La HCC a examiné la loi n°2024-001 en se basant sur les articles de la Constitution malgache, les conventions internationales ratifiées par Madagascar, et les principes fondamentaux des droits de l’homme. Deux articles ont particulièrement attiré l’attention de la Cour en raison de leur non-conformité.

Article 6: Cet article propose la présentation publique des personnes appréhendées dans les cas de viol, sous la supervision du Procureur de la République. La HCC a jugé cette disposition contraire aux articles 13 alinéas 6, 7, 8 et 9 de la Constitution, qui garantissent les droits de la défense et la présomption d’innocence. La présentation publique avant toute condamnation définitive s’apparente à une présomption de culpabilité et exerce une pression injustifiée sur le juge, compromettant ainsi l’équité du procès.

Article 9 alinéa 1: Cet article introduit des mesures pénales rétroactives plus sévères, ce qui va à l’encontre de l’article 13 alinéa 3 de la Constitution, qui stipule que nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi promulguée et publiée antérieurement à la commission de l’acte punissable. La rétroactivité des lois pénales, surtout lorsqu’elles sont plus sévères, est interdite, ce qui a conduit la HCC à déclarer cet article non conforme.

La Peine de Castration

Un des éléments les plus novateurs et controversés de la loi n°2024-001 est l’introduction de la castration chimique et chirurgicale pour les auteurs de viols sur mineurs. La HCC a validé cette mesure sous certaines conditions strictes, mettant en avant la nécessité d’assurer la proportionnalité de la peine par rapport aux objectifs poursuivis.

Castration Chirurgicale versus Chimique: La Cour a insisté sur la nécessité de remplacer la castration chimique par la castration chirurgicale pour garantir la neutralisation définitive des prédateurs sexuels et prévenir la récidive. La castration chimique, étant temporaire et réversible, n’atteint pas l’objectif de sécurité publique et de protection des mineurs de manière suffisante.

Conformité aux Droits Humains: La HCC a souligné que la castration chirurgicale doit être exécutée de manière à ne pas causer de souffrances aiguës, physiques ou morales, conformément à l’article 2 de la loi n°2008-008 contre la torture. Pour ce faire, le gouvernement doit préciser, par voie réglementaire, les modalités d’exécution de cette peine en respectant les droits humains.

Mesures Validées et Réserves de la HCC

Articles Déclarés Conformes

La HCC a validé plusieurs articles de la loi n°2024-001, sous réserve de certaines conditions et précisions. Ces articles visent à renforcer la législation pénale pour mieux protéger les mineurs contre les violences sexuelles.

Articles Validés: Les articles 1, 2, 3, 4, 7, 8, 9 alinéa 2, 10 et 11 ont été déclarés conformes à la Constitution. Ces articles portent sur diverses modifications, comme l’inclusion de la castration parmi les peines afflictives, la révision des peines en fonction de l’âge des victimes, et l’établissement de circonstances aggravantes en cas de viol. Ces dispositions visent à créer une législation dissuasive et préventive contre les crimes sexuels sur les mineurs.

Réserve sur la Castration: La HCC a conditionné la validité de la castration chirurgicale à la publication d’un texte réglementaire détaillant les modalités de son exécution. Cette réserve vise à garantir que la mise en œuvre de cette peine respecte les normes des droits humains et évite toute forme de traitement inhumain ou dégradant.

Publication et Notification

La décision de la HCC a été communiquée aux autorités compétentes pour assurer sa mise en œuvre et sa transparence. La publication de cette décision au Journal Officiel de la République de Madagascar est prévue pour informer le public et les acteurs judiciaires des nouvelles dispositions.

Notification aux Autorités: La HCC a notifié cette décision au Président de la République, au Premier Ministre, au Chef du Gouvernement, ainsi qu’aux présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat. Cette notification vise à garantir que les mesures validées soient correctement intégrées dans le cadre législatif et exécutif du pays.

Importance de la Transparence: La publication officielle de la décision est essentielle pour assurer la transparence et l’adhésion publique aux nouvelles mesures pénales. Elle permet également de sensibiliser les citoyens aux modifications du Code pénal et aux efforts déployés pour renforcer la protection des mineurs contre les violences sexuelles.


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