On va mettre en lumière une problématique qui prend une tournure particulièrement persistante ces derniers jours. Entre le CT moto et les ZFE, l’entretien, quand ce n’est pas le renouvellement, de nos véhicules est au cœur de nos préoccupations. Les restrictions imposées aux particuliers dans l’entretien de leurs véhicules se posent de plus en plus dans un contexte de lutte contre la pollution et de protection de l’environnement. Les questions qui se posent dès lors sont relatives à la liberté des individus d’user de leurs droits de propriété sur leurs biens. Droit, qui, comme bien d’autres, est soumis aux contraintes d’autres droits, ici le droit environnemental, et aux abus susceptibles d’entraîner des sanctions.
Nous voulons donc, en premier lieu, connaître le cadre juridique de l’entretien des véhicules par leurs propriétaires. Par la suite, il faudra l’inscrire dans les limites imposées par la conservation de l’environnement (II). L’idéal étant d’arriver à un équilibre entre répression et sensibilisation de la part des forces de l’ordre. Les propriétaires se sentant atteints dans leurs droits supportent de moins en moins les obligations légales.
I. Le cadre juridique de l’entretien des véhicules par les particuliers.
Le cadre légal de l’entretien des véhicules personnels est celui de la pleine propriété. Le nu-propriétaire en a donc l’usus, le fructus et l’abusus. Donc il fait ce qu’il veut de son véhicule (A). Mais étant donné que les libertés se limitent les unes les autres, cette liberté est limitée par la défense de l’environnement (B).
A. Le droit des particuliers à entretenir leurs véhicules.
En droit français, aucun texte n’interdit expressément à un particulier d’effectuer des réparations ou un entretien sur son véhicule personnel, dès lors que cela se déroule sur une propriété privée. Car bien entendu, la voie publique est faite pour circuler et non pas pour faire de la mécanique. Si toutefois tu démontes ta voiture sur le trottoir, que la police municipale passe et te laisse faire : mille fois tant mieux pour toi. Mais ce n’est pas fait pour ça. En cas de remontrance, il n’y a aucune discussion à tenir, tu es en tort, point final.
Si le droit de propriété, garanti par l’article 544 du Code civil, confère au propriétaire d’un véhicule la liberté d’en disposer, y compris pour des opérations de maintenance, c’est sous réserve de ne pas causer de troubles anormaux au voisinage, régis par l’article 1240 du Code civil disposant de la responsabilité civile.
Quant à lui, le Code de l’environnement, notamment ses articles L. 541-1 et suivants, impose toutefois une gestion responsable des déchets produits, tels que les huiles usagées ou les pièces métalliques. Il faut vraiment insister sur ce point : il faut collecter méticuleusement ces déchets et les déposer en déchetterie, ce qui est conforme aux obligations légales.
B. Les restrictions imposées par la réglementation.
Malgré ce droit, des restrictions s’appliquent, notamment sur la voie publique. C’est le Code pénal en son article R. 644-2 et les règlements municipaux qui interdisent les réparations sur la voie publique, sauf en cas d’urgence, pour des raisons de sécurité et de propreté. Pour l’avoir vu un nombre certain de fois, il arrive que des particuliers effectuent des vidanges sur des trottoirs, ce qui constitue une infraction passible d’une amende. Mais bien souvent cette pratique est tolérée, dès lors il vous appartiendra de mettre tout en œuvre pour ne laisser ni déchet, ni trace d’effluve, et encore moins de laisser s’écouler les liquides usagés dans les égouts.
D’un point de vue contractuel, les garanties des véhicules récents peuvent limiter les interventions des particuliers. En cas de modification ou d’entretien non effectué par un professionnel agréé, le constructeur peut refuser la prise en charge sous garantie, ce qui constitue une contrainte mais elle est contractuelle et aucunement légale. Libre à vous d’en assumer les conséquences.
II. Les enjeux de la lutte contre les abus environnementaux.
Dans un reportage, il est question d’un cas d’abus manifeste, où un individu stocke une vingtaine de carcasses de véhicules sur son terrain, suscitant l’intervention d’une brigade environnementale. Cette situation illustre les tensions entre la répression des comportements nuisibles (A) et la nécessité de préserver les droits des particuliers (B).
A. La répression des abus et ses fondements juridiques.
La création de brigades spécialisées au sein de la gendarmerie s’inscrit dans le renforcement des politiques de protection de l’environnement. Le Code de l’environnement (articles L. 541-21 et suivants sus-cités) sanctionne le dépôt illégal de déchets, notamment les véhicules hors d’usage (VHU), qui doivent être confiés à des centres agréés conformément à la directive européenne 2000/53/CE.
Dans le cas décrit, l’individu, ayant accumulé des carcasses et ayant été préalablement prévenu par les gendarmes, est resté sans agir pendant quatre mois. Dès lors, il encourt des sanctions pénales, telles que des amendes ou la confiscation des biens, ainsi que des mesures administratives comme la mise en demeure de régulariser la situation. Cette répression vise à prévenir les pollutions des sols et des eaux par des substances dangereuses (huiles, carburants).
B. L’équilibre entre répression et sensibilisation.
Dans ce reportage de TF1, l’approche des forces de l’ordre, qui, en suggérant que les particuliers « n’ont pas à » entretenir leurs véhicules, risque de décourager des pratiques légitimes et économiquement quasi nécessaires pour les ménages modestes. Cette communication ambiguë pourrait exacerber les tensions sociales en provoquant un sentiment d’injustice chez les « petites gens ».
Une approche plus équilibrée consisterait à renforcer la sensibilisation sur les bonnes pratiques (collecte des déchets, recyclage) tout en ciblant prioritairement les abus manifestes, tels que les décharges sauvages ou les activités professionnelles non déclarées. Il est donc important de proposer des mesures concrètes, comme l’utilisation de bâches ou de cartons pour éviter les pollutions, qui pourraient être intégrées dans les trousses à outils des bricoleurs.
En effet, savoir dans quel sens tourner la vis ne suffit plus aujourd’hui. Il est impératif, moralement et obligatoire légalement, de gérer ses déchets aussi bien qu’un professionnel.
Le cadre juridique de l’entretien des véhicules par leurs propriétaires offre une certaine liberté, mais impose des contraintes strictes pour protéger l’environnement et la sécurité publique.
Si la répression des abus, comme les dépôts illégaux de VHU, est justifiée, elle doit s’accompagner d’une communication claire et d’une sensibilisation accrue pour éviter de pénaliser les particuliers honnêtes.
Une approche équilibrée, combinant sanctions ciblées et accompagnement des bonnes pratiques, permettrait de concilier les impératifs environnementaux avec les réalités économiques des citoyens.